Sur le caractère aléatoire de l'insertion
L'insertion se fait au hasard, que la méthode soit l'une quelconque des suivantes :
- par biolistique : on bombarde des cellules avec des billes de tungstène sur lesquelles on a badigeonné une solution contenant un gène d'intérêt (synthèse d'insecticide ou résistance à u nherbicide) et un gène marqueur (qui permet de savoir facilement si l'autre gène a été inséré : par exemple un gène de résistance à un antibiotique). Ces gènes sont souvent obtenus à partir de leur insertion (par une méthode qui peut être aussi biolistique ...) dans le génome d'une bactérie (E. coli par exemple) qui, en se multipliant, multipliera la double séquence gène d'intérêt-gène marqueur ;
- par la bactérie Agrobacterium tumefaciens : cette bactérie, qui a été découverte il y a longtemps et qui existe dans la nature, a la propriété d'infecter les plantes. Pour cela, elle parvient à transférer une partie de son propre génome (sans qu'il soit exactement le même à chaque fois) dansle génome d'une cellule hôte. Du coup, la plante réagit (ou plutôt les cellules attaquées !) en nécrosant les cellules ainsi polluées. Ce qui montre bien qu'une plante peut " voir " (insistons sur les guillemets) que son génome est pollué. La bactérie a ainsi provoqué une forme de maladie (la gale). Cela explique son nom (tumefaciens = qui fait une tumeur).
Ainsi, l'INRA [1] reconnaît qu'il « n'est donc pas toujours possible de savoir à l'avance quelles séquences du génome seront modifiées par l'insertion et quelles en seront les conséquences et ce, d'autant plus qu'il existe des phénomènes d'interaction entre les différents gènes d'un génome ». Le même texte souligne que l'ADN modifié et recombiné pourrait devenir « capable de synthétiser des substances nouvelles pouvant s'avérer nocives ». L'INRA poursuit en soulignant le problème que « les mécanismes de contrôle protecteurs du gène inséré peuvent être déstabilisés par le transfert et devenir par là même inefficaces ». Il est fait allusion ici aux effets pléïotropiques qui font que l'insertion d'un gène peut modifier le fonctionnement d'un autre gène, voire faire que la cellule neutralise un autre gène ou en réactive un autre encore.
Les conséquences sont donc imprévisibles et graves.
Prenons un exemple bénin pour montrer que, ne contrôlant rien, on n'aura pas toujours autant de chance. Hans-Jorg Buhk (directeur de l'Institut Robert Koch à Berlin) reconnaît que « les scientifiques ne savent pas tout à l'avance » et ajoute que des événements totalement imprévus peuvent arriver. Ainsi il nous apprend [2] la vraie histoire de la tomate développée par l'entreprise Zeneca et qui fût le premier OGM commercialisé.
Cette tomate était manipulée pour rester plus longtemps
sans pourrir sur les étagères des épiciers,
grâce à l'inversion d'un gène de la
polygalacturonase. Cette protéine (qui est aussi une enzyme)
permet à l aplante d'attaquer la peau afin de la rendre plus
fragile et, enfin, permettre à la plante qui continue de murir,
d'éclater pour permettre aux graines de se projeter vers
l'extérieur et donc assurer une postérité. Selon
Buhk, l'effet attendu a été finalement obtenu non par le
gène inséré, mais par l'inactivation d'un autre
gène. En clair, cela a marché, mais c'est par hasard !
Un autre exemple a montré que même avec les bons
gènes, une fonction pouvait ne pas être activée si
les gènes sont dans le mauvais ordre [3].
Enfin, on a découvert en 2001 que le soja OGM le plus vendu au monde contenait un morceau d'ADN surnuméraire non prévu et non décrit par l'entreprise qui le commercialise depuis 1996 [4].
On a aussi prouvé que quatre OGM déjà autorisés ont vu leurs construction génétiques se réorganiser. Le maïs T25 LibertyLink (Bayer), maïs Bt Mon 810 YieldGard (le terminateur s'est déplacé ailleurs dans le génome et la fin de la séquence codante est tronquée ...) de Monsanto, le soja résistant au Roundup GTS 40-3-2 de Monsanto (un autre morceau d'ADN homologue au gène d'intérêt (EPSPS) est trouvé et l'emplacement de l'insertion varie d'une plante à l'autre, montrant un réarrangement important), le maïs Bt 176 de Syngenta (Bt, résistant au glufosinate et mâle stérile), le maïs GA 21 résistant au roundup de Monsanto [Collonier].
Un autre exemple fera peut-être un autre mort des suites d'une
thérapie génique. Sur les deux seuls enfants qui avaient
été apparemment soignés (pas guéris !) par
l'équipe du Prof. Fisher, on a découvert que l'un
développait une leucémie aigüe. La cause
alléguée est une "mutagénèse
insertionelle" [5]. En clair, l'insertion du
gène a induit une modification d'un autre gène, lequel
est la cause de la leucémie ... Une des cause probable est que
le vecteur de la thérapie génique en question est un
rétrovirus de la leucémie de la souris Moloney. On a
aussi détecté un cas de leucémie chez une souris
traitée avec un autre vecteur [6].
[1] Les dossiers de l'environnement de
l'INRA n° 12, 1996
[2] Nature Vol. 398, 22 avril 1999 p. 651
[3] News Scientist 8 mai 1999 (Nature
Genetics, vol 22, p 90)
[4] Windels P, Taverniers I, Depicker
A, Van Bockstaele E and De Loose M (2001). Characterisation of the
Roundup Ready soybean insert. Eur Food Res Technol DOI 10.1007/
s002170100336, © Springer-Verlag;. On peut voir aussi la dépèche
Reuters en anglais.
[Collonier] Collonier C, Berthier G,
Boyer F, Duplan M-N, Fernandez S, Kebdani N, Kobilinsky A, Romanuk M,
Bertheau Y. Characterization of commercial GMO inserts: a source of
useful material to study genome fluidity. Cf. aussi la
page consacrée à ce poster sur le site d'I-SIS.
[5] Science, News of the Week, 4 October 2002.
[6] Li Zhixiong, Dllmann J, Schiedlmeier
B, et al.: Murine leukemia induced by retroviral gene marking.
Science 2002, 296:497.