OGM : la volonté générale doit être la loi !

Article paru dans L'Ecologiste numéro 8

Il est déjà arrivé dans l'histoire que des minorités aient un combat juste. Avec les OGM, c'est une majorité (71 %) qui « refuse ce type de nourriture  » [1] et l'Etat, censé représenter les citoyens dans une conception naïve de la démocratie, qui les autorise. La loi, édictée par l'Etat et ses lobbys d'entreprises et de chercheurs, étant contestée, il ne reste plus aux citoyens qu'à l'enfreindre. La Confédération Paysanne, d'autres organisations et quelques individus ont ainsi pratiqué des fauchages au grand jour l'an dernier. D'autres personnes, plus circonspectes envers l'Etat, ont choisi l'anonymat, mais en expliquant leurs actes (Cf. des extraits en fin d'article). La réaction de l'Etat a été de condamner très lourdement les faucheurs. Par exemple, René Riesel et José Bové totalisent 14 mois de prison ferme chacun. Le 8 février 2002, Bernard Moser a été condamné à six mois de prison ferme et ses collègues de Valence à 78 156 euros pour les dommages à une parcelle de maïs !

Personne ne nie le caractère illégal de ces fauchages, puisque c'est la loi elle-même qui est contestée. La disproportion de ces sanctions avec celles de nombreux autres délits bien plus graves montre que, comme toujours, l'Etat s'est mis du côté des puissants et s'est fait le bras armé de ceux (privés comme publics) qui veulent se rendre " comme maîtres et possesseurs de la Nature " (Descartes). L'efficacité de l'Etat a été totale puisqu'il n'y a pas eu de fauchage à découvert cette année.

Maniant le bâton, il a utilisé la carotte : la conférence des citoyens de 1998 a été bafouée puisqu'elle préconisait l'interdiction d'OGM contenant un gène de résistance aux antibiotiques alors qu'un tel OGM a été autorisé trois mois plus tard. Les conclusions de la conférence des quatre "sages" de cette année n'ont peut-être même pas été lues : les "sages" préconisaient un meilleur encadrement des essais, mais de nouvelles autorisations ont été données sans changement de la procédure ni de la biovigilance.

Le 16 mai 2002, l'association Greenpeace a révélé une étude commandée par la Commission européenne sur la possibilité d'une double filière au Centre de recherches communes. On comprend que la Commission aurait souhaité garder cette étude secrète quand on lit dans les conclusions : " il semble clair que la coexistence avec un seuil (...) de 0,1% est virtuellement impossible dans tous les scénarios considérés ". Cette étude est la reconnaissance scientifique d'une évidence : l'agriculture transgénique éradiquera à terme toute autre agriculture.

Cette année, la DGAL a contrôlé des semences de maïs importées. Un quart d'entre elles contenait des traces d'OGM [2]. Il a été décidé de les commercialiser alors qu'aucun seuil légal n'étant décidé, tous les lots contenant un OGM non autorisé auraient dû être interdits à la vente. De surcroît, ces révélations de contaminations travaillent à la banalisation du transgénique.

Il existe des initiatives pour reprendre en main nos libertés et nos choix. Un collectif a lancé la campagne Pas d'OGM dans ma commune [3] . Plus de six cents maires ont déjà répondu en prenant un arrêté interdisant essai ou culture d'OGM sur leur commune. Cette campagne est également menée dans plusieurs pays européens. De plus, la conscience que la critique de la malbouffe et des risques environnementaux doit maintenant se porter sur la place de la recherche et la réflexion philosophique s'impose petit à petit.

Pour autant, il ne faut pas se leurrer sur le " contrôle citoyen " puisque l'Etat ne respecte pas sa loi. Pour conclure, nous citerons un extrait d'un communiqué envoyé par un groupe de faucheurs :

" (...) Nous dénions à tous les pouvoirs économiques et politiques le droit de continuer à empoisonner nos vies et la planète et incitons à reprendre en main nos libertés et nos choix, en les empêchant de continuer à nuire partout où nous le pouvons.

Nous ne laisserons pas le capitalisme, les bricoleurs irresponsables de la technoscience et les politiciens nous imposer impunément leur recherche du profit à tout prix et leur mainmise sur les éléments de base de la vie, transformés en nouvelles marchandises.

Nous avons donc procédé à quelques nettoyages à proximité de deux laboratoires, d'abord chez CAUSSADE SEMENCES à CAYRAC, le 9 juin 2002 (...) puis chez PIONEER à MONTECH, le 16 juillet 2002 (...).

Signalons à ceux qui ( ! ) s'illusionnent sur le " contrôle citoyen " de leur empoisonnement qu'aucun de ces essais n'avait été affiché en mairie.

Ajoutons au pouvoir du refus, le refus des pouvoirs qui nous aliènent. (...) "

Anne Liebskind, Hervé Le Meur
OGM dangers

[1] Sondage européen Eurobaromètre 2001 http://europa.eu.int/comm/research/press/2001/pr0612en.html
[2] Les Echos 6 août 2002
[3] Cf. par exemple le site http://www.OGMdangers.org/action/commune, écrire au collectif 97 rue Pelleport 75020 Paris ou contacter la Confédération Paysanne 81, avenue de la République 93170 Bagnolet

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