Résistances aux toxines Bt d'OGM
La résistance à un insecticide ne résulte pas d'un flux d'information génétique. La résistance résulte donc d'une pression de sélection favorable modifiée par l'usage de pesticide (insecticide, fongicide, ...). Ces résistances peuvent être végétales ou animales (si un insecte, à cause du sur-usage d'OGM typiquement Bt, résiste à cet insecticide par exemple). Il existe un site qui recense les résistances apparues chez des arthropodes : https://www.pesticideresistance.org. Un livre a été consacré au sujet par TWN.
En parallèle, nous consacrons une page spéciale à la tolérance
à un herbicide (TH) qui peut résulter soit d'un flux génétique,
soit d'une modification de la pression de sélection.
Plusieurs choses sont connues et indubitables.
La première est que la présence d'un insecticide (fut-il similaire à
un insecticide naturel) risque (selon les doses, l'insecte, ...)
d'engendrer une résistance.
La seconde est que l'apparition de cette résistance sera d'autant plus
rapide que l'exposition est faible (sans être nulle).
La troisième qu'une fois que la résistance est apparue, le simple
usage de l'insecticide engendre une pression de sélection favorable à
la multiplication de ce mutant. Et donc à terme nous prive de
l'insecticide. Et donc nous expose à devoir plus polluer !
L'association InfOGM publie d'excellents articles pour commenter chaque publication. Plusieurs articles sont d'excellents digests (ici par exemple).
- aout 2020. Une étude américaine [Luna20] explique sur une longue période l'adoption puis le refus du coton BT au Burkina faso. L'article détaille les manoeuvres de propagande pour encourager (sur la base d'études partiellement vraies) la culture du coton, spécialement pour les petits fermiers burkinabe. Et puis après plusieurs années, cela s'avère un fiasco monumental. Une version vulgarisatrice a été rédigé pour le site The Conversation.
- aout 2020. Une étude américaine [Coates 2020] prouve (à nouveau) que plus les insectes sont exposés à la protéine Bt plus ils lui deviennent résistants.
- juillet 2020. Une étude américaine [Reay-Jones 2020] 2020] montre que l'exposition aux OGM Bt augmente la tendance à des retards de développement et à l'apparition de développement de résistances au Bt chez des larves de prédateurs.
- mai 2018. Le coton Bt cultivé aux EUA et de plus en plus confronté à des résistances. Des données de 2017 publiées en 2018 montrent que toutes les populations de bollworm montrent une grande résistance aux toxines Cry1Ac qui sont les premières générations de Bt mises dans le coton et le maïs contre cet insecte. Environ 70-75% de ces populations ont aussi montré une résistance aux toxines Cry2. La résistance était aussi observée à une combinaison des toxines Cry1Ac et Cry1F.
- Mai 2018. Le Pectinophora gossypiella (pink bollworm) est un insecte nuisible à la culture du coton. Il est devenu résistant au Bt contenu dans les coton OGM cultivé en Inde.
- 11 octobre 2017 : une étude montre que « le nombre de cas de résistance d'un nuisible à une protéine Bt Cry produite par des cultures transgéniques s'est accru de 3 en 2005 à 16 en 2016.» [Tabashnik17]
- février 2016 : une étude envisage que le Burkina faso, après avoir développé le coton Bt pour ses petits fermiers pourrait abandonner (cf. suite en aout 2020).
- 27 janvier 2014. Une étude parue dans les PNAS montre que si une culture d'OGM Bt produit moins qu'une certaine dose de Bt contre les espèces cibles, elle peut sélectionner des insectes pour une résistance rapidement. Plus concrètement elle crée une pression de sélection favorable aux plantes résistantes ...
- 2014 : Dans un article [Grassman2014], les auteurs montrent que l'insecte Diabrotica (western corn rootworm en anglais) qui devait être contrôlé par des protéines Bt (Cry3Bb1 et mCry3A) a en fait développé une résistance, dans les champs où des OGM produisant ces protéines ont été utilisés. Les auteurs soulignent que même une double protéine ne fait que ralentir le processus d'apparition de résistance.
- 2013 : un excellent article de résumé (review pour les scientifiques) [Tabashnik13] passe en revue 77 études sur l'apparition de résistances au Bt. Cet article est commenté sur le site d'Inf'OGM avec un tableau très impressionnant sur les apparitions de résistances chez divers insectes.
- 2013 : Des chercheurs de l'IRD et de l'université de Northwestern (EUA) montrent que la résistance de l'insecte Busseola fusca au Bt est en fait dominante et non récessive. En clair il suffit qu'un seul des parents l'ait pour que tous les petits l'aient. La pression de sélection est alors très forte. [Campagne13].
- 2012 : Une équipe dirigée par le Pr. Kongming Wu, de l’Académie des sciences agricoles chinoises, rapportait une résistance au coton Bt, apparue au champ, du ver rose du cotonnier [Wu12].
- 2012 : Une étude [Oswald12] montre que des insectes résistants au Bt verraient un développement plus rapide de leur larve et une plus grande fécondité lorsqu’ils se nourrissent de plants de maïs MON863 plutôt que de plants non GM. Ces résultats « constituent une menace significative quant à la future viabilité du contrôle biotechnologique des parasites ».
- 2011 : l’équipe du Pr. Grassmann, de l’Université d’Iowa, montrait, en complément de témoignages d’agriculteurs (que les idolâtres du Progrès ne veulent pas entendre), que la chrysomèle des racines du maïs (Diabrotica virgifera virgifera) développe, après trois années de culture, des résistances à la protéine insecticide Cry3Bb1, présente dans des maïs génétiquement modifiés (GM) [Grassman11].
- 2010 : Une étude [Tabashnik10] montre d'autres insectes qui sont devenus résistants au Bt aux EUA.
- 2010 :Ce qui suit est en deux temps. Une première étude publiée en
2008 avait montré que l'usage intensif d'un coton Bt (en Chine du
Nord) avait réduit la prolifération de la noctuelle de la tomate (Helicoverpa
armigera) y compris sur les cultures non cibles
[3]. Jusque là on peut croire en un avantage des OGM.
L'internaute pro-OGM ne pourra pas les accuser d'être anti-OGM
(comme si on était alors forcément malhonnête !).
Mais constatant cet effet secondaire « bénéfique » d’une culture OGM sur l’écosystème, ces mêmes chercheurs précisaient déjà dans cet article que « l’impact à long terme du coton Bt sur les arthropodes non cibles dans l’agro-ecosytème local restait à évaluer »
Une nouvelle méta-étude [2] dans la revue Science a montré en 2010 qu'en Chine, l'usage de ce même coton OGM Bt encourage la prolifération de miridés (prédateurs résistants au Bt) et donc à terme accroît l'usage d'insecticides. Comme ils le disent, « du piège à miridés qu’étaient les exploitations conventionnelles de coton, celles de coton Bt sont devenues de véritables couveuses pour ce nuisible ». Ici, c'est
1) en champs (et non en labo)
2) sur 10 ans (et non sur 2 mois)
3) à très grande échelle. - 2009 : une étude [Tabashnik09] montre que Spodoptera frugiperda à Porto-Rico, Busseola fusca en Afrique du Sud, Helicoverpa zea aux Etats-Unis ont des individus qui sont résistants au Bt.
- 2008 : des chercheurs de l'Université d'Arizona ont mis en évidence le premier cas documenté de résistance d'insectes à une plante génétiquement modifiée pour produire son propre insecticide, un coton OGM porteur d'une toxine Bt, selon Nature Biotechnology [1].
- 2008 : l’équipe du Pr. Xue de l’Université de Pékin montre que les pucerons Aphis gossypii pénètrent et se nourrissent plus facilement sur le coton Bt que sur le coton non Bt, du fait d’une densité de poils (appelés trichomes) sur la surface des feuilles de coton Bt moins importante que sur celles des cotons non GM [Xue08].
- 2006 : deux études, en laboratoire, montrent que des larves se développant sur une plants OGM Bt ne sont pas forcément tuées par le Bt. En conséquence la pression de sélection pour qu'elles résistent devient très forte ... Lire le digest sur le site d'Inf'OGM où ils citent [Clark06] et [Nowatski06].
- 2005 : Une étude montre que l'usage d'une plante avec un double gène Bt est nettement plus efficace pour limiter la propagation de résistances que deux cultures proches de plantes ayant un seul gène (et donc une seule protéine). Autrement dit une technique plus complexe limite la nécessité de recourir à des zones refuge. D'autant que, comme le disent les auteurs, « Avoir un refuge est une bonne stratégie de gestion, mais elle n'est pas adaptée pour les petits fermiers de Chine et d'Inde.» [Zhao].
Référence :
[1] http://fr.news.yahoo.com/afp/20080208/tsc-bio-agr-gen-c2ff8aa_1.html
[2] Mirid Bug Outbreaks in Multiple Crops Correlated
with Wide-Scale Adoption of Bt Cotton in China, Yanhui Lu et
al.Science 28 May 2010: Vol. 328. no. 5982, pp. 1151 - 1154
[3] Suppression of Cotton Bollworm in Multiple Crops in
China in Areas with Bt Toxin–Containing Cotton Science
19 September 2008 Vol. 321. no. 5896, pp. 1676 - 1678. Cf. aussi une
page sur le site de VIvagora.
[Campagne13] Dominant
inheritance of field-evolved resistance to Bt corn in Busseola fusca,
P. Campagne et al., Plos One, 2013, july, Vol 8, Issue7.
[Clark06] Diabrotica virgifera virgifera
larval feeding behavior on transgenic maize (MON 863) and its isoline,
Clark P.L. et al., Journal of Economic Entomology,
2006, 99(3), 722-727
[Coates 2020] Brad S Coates et al.
Geographic Distribution of Bacillus thuringiensis Cry1F
Toxin Resistance in Western Bean Cutworm (Lepidoptera: Noctuidae)
Populations in the United States, Journal of Economic Entomology,
(2 aout 2020) toaa136, https://doi.org/10.1093/jee/toaa136
[Grassman11] Grassman J. A. &
al., « Field-Evolved Resistance to Bt Maize by Western Corn
Rootworm », PLoS ONE, 2011, 6(7):e22629.
[Grassman2014] Field-evolved resistance by western corn rootworm to
multiple Bacillus thuringiensis toxins in transgenic maize
Grassman et al. PNAS Mars 2014
[Luna20] Jessie K. Luna, Brian Dowd-Uribe,
Knowledge politics and the Bt cotton success
narrative in Burkina Faso, World Development, Volume
136, December 2020, 105127
[Nowatski06] Effect of Bacillus
thuringiensis Cry3Bb1 protein on the feeding behavior and longevity of
adult western Corn Rootworms, T.M. Nowatzki et al., Journal of
Economic Entomology, 2006, 99 (3), 927-930
[Oswald12] Assessment of fitness costs
in Cry3Bb1-resistant and susceptible western corn rootworm (Coleoptera
: Chrysomelidae) laboratory colonies, Oswald, K. et al., Journal
of Applied Entomology, 2012
[Reay-Jones 2020] F.P.F. Reay-Jones,
T.R. Bilbo, D.D. Reisig, Decline in Sublethal Effects of Bt Corn on Corn
Earworm (Lepidoptera: Noctuidae) Linked to Increasing Levels of
Resistance Journal of Economic Entomology, toaa163, https://doi.org/10.1093/jee/toaa163
[Tabashnik09] Field-Evolved Insect Resistance to Bt Crops :
Definition, Theory, and Data, B. Tabashnik, et al., J. Econ.
Entomol. 102(6) : 2011-2025 (2009)
[Tabashnik10] Field-Evolved
Resistance to Bt Cotton : Bollworm in the U.S. and Pink Bollworm in
India, B. Tabashnik et al., Southwestern Entomologist, Oct
2010 : Vol. 35, Issue 3, pg(s) 417-424
[Tabashnik13] Insect resistance to
Bt crops : lessons from the first billion acres, B.E. Tabashnik et
al., Nature Biotechnology, juin 2013, Vol 31, n°6, pp.
510-521
[Tabashnik17]
Tabashnik, B. E., & Carrière, Y. (2017), Surge in insect
resistance to transgenic crops and prospects for sustainability, Nature biotechnology,
35(10), 926 https://www.nature.com/nbt/journal/v35/n10/full/nbt.3974.html
[Wu12] Increased frequency of pink bollworm
resistance to Bt toxin Cry1Ac in China, Wan P. et al., PLoS One.
2012 version en ligne.
[Xue08] Leaf surface factors of
transgenic Bt cotton associated with the feeding behaviors of cotton
aphids, Xue K et al., Sci China C Life Sci. 2008 Apr
;51(2):145-56
[Zhao] Jian-Zhou Zhao et al.
Concurrent use of transgenic plants expressing a single and two
Bacillus thuringiensis genes speeds insect adaptation to pyramided
plants 8426–8430 PNAS June 14, 2005 vol. 102 no. 24 Cf. la présentation
de leur article. En gros, ils montrent que la présence d'OGM Bt
avec un seul gène de type Bt engendre plus facilement l'apparition
d'une résistance que si on met deux gènes (et pourquoi pas dix ?).